Pourquoi reportons-nous certaines démarches administratives ? Quel lien entre l'évitement et la logique interne
L’art de l’évitement
Les démarches administratives – déclarations d’impôts, dossiers bancaires, contrats, ou paperasse en tout genre – sont rarement perçues comme une partie de plaisir. Pourtant, certaines personnes les traitent avec une efficacité presque mécanique, tandis que d’autres les reportent systématiquement, parfois jusqu’à la dernière limite, voire au-delà. Cet évitement n’est pas une question de paresse ou de désorganisation, mais le symptôme d’une logique interne bien plus profonde.
Derrière chaque dossier non ouvert, chaque email administratif ignoré, ou chaque rendez-vous chez le notaire repoussé, se cachent des croyances, des peurs, ou des mécanismes de protection inconscients. Ces comportements ne sont pas aléatoires : ils révèlent comment nous percevons l’autorité, le contrôle, la sécurité, ou même notre propre valeur.
Dans cet article, nous allons explorer pourquoi nous évitons certaines démarches administratives, et comment ces évitements reflètent nos logiques internes. Pas pour nous juger, mais pour comprendre, et, éventuellement, agir différemment.
L’évitement comme mécanisme de protection
La peur de l’autorité et du jugement
Certaines démarches administratives nous confrontent à des figures d’autorité : l’administration fiscale, la banque, un notaire. Pour ceux qui ont intériorisé une méfiance envers ces institutions (par expérience personnelle, éducation, ou culture), chaque interaction peut déclencher une peur du jugement ou de la sanction.
Exemple concret : Un indépendant qui repousse sa déclaration de revenus par crainte de se tromper et d’être pénalisé. Son évitement n’est pas lié à un manque de temps, mais à une croyance sous-jacente : « Si je fais une erreur, je serai puni. » Cette peur peut remonter à une expérience passée (un contrôle fiscal stressant, un parent anxieux face à l’administration), ou à une méconnaissance des règles, perçues comme arbitraires.
La logique interne sous jacente : « Je ne maîtrise pas les règles, donc je suis en danger. » « Mieux vaut éviter que de risquer une erreur. »
L’
Paradoxalement, reporter une démarche administrative peut donner l’illusion de garder le contrôle. Tant que le dossier n’est pas ouvert, la situation reste floue, et donc « gérable » dans l’esprit.
Exemple concret : Un entrepreneur qui ne met pas à jour ses comptes parce que « tant qu’il ne regarde pas, la situation n’est pas grave ». En réalité, cette attitude reflète une peur de perdre le contrôle : « Si je vois les chiffres, je devrai agir, et je ne sais pas comment. »
La logique interne qui s'exprime : « Ignorer le problème, c’est le maintenir à distance. » « Agir, c’est prendre le risque de découvrir une mauvaise nouvelle. »
L’évitement comme reflet d’un déséquilibre
Le manque de clarté engendre la paralysie
Quand une démarche administrative semble complexe ou mal expliquée, l’évitement devient une réaction de défense. Le cerveau, confronté à une tâche qu’il ne comprend pas entièrement, préfère la repousser plutôt que de s’y confronter.
Exemple concret : Un particulier qui ne remplit pas un formulaire bancaire parce que les termes juridiques lui semblent incompréhensibles. Son évitement n’est pas un manque de volonté, mais le signe que le système ne lui parle pas.
La logique interne s'article autour de : « Si je ne comprends pas, je ne peux pas agir correctement. » « Demander de l’aide, c’est avouer mon ignorance. »
La
Certaines démarches administratives entrent en conflit avec nos valeurs profondes ou notre vision de nous-mêmes. Par exemple :
- Un artiste qui repousse ses déclarations fiscales parce qu’il associe l’argent à une forme de « trahison » de sa créativité.
- Un dirigeant qui évite de négocier avec sa banque par peur de passer pour « cupide » ou «matérialiste ».
La logique interne qui s'exprime : « Ces démarches ne correspondent pas à qui je suis. » « M’occuper de ça, c’est renoncer à mon identité. »
L’évitement comme symptôme d’un besoin non comblé
Le
Reporter une démarche administrative peut aussi révéler un besoin de sécurité non satisfait. Par exemple :
- Une personne qui ne souscrit pas à une assurance parce qu’elle craint de devoir affronter sa propre vulnérabilité.
- Un héritier qui retarde les démarches successorales par peur de « tourner la page » après un deuil.
La logique interne qui est sous jacente : « Si je fais cette démarche, je devrai accepter une réalité douloureuse. » « Tant que je n’agis pas, je peux prétendre que tout va bien. »
Le
Certaines démarches (comme demander un prêt, négocier un délai, ou réclamer un droit) impliquent de se mettre en avant, ce qui peut être inconfortable pour ceux qui craignent le rejet ou l’humiliation.
Exemple concret : Un freelance qui ne réclame pas un paiement en retard par peur de perdre un client. Son évitement cache une logique : « Mes besoins ne méritent pas d’être prioritaires. »
La logique interne polluante : « Demander, c’est risquer d’être rejeté. » « Mes droits sont moins importants que le maintien de la relation. »
Comment briser le cycle de l’évitement ?
Imaginez la scène : un dossier posé sur le coin d’un bureau, une enveloppe administrative non ouverte depuis des semaines, ou un email de relance de l’administration fiscale qui clignote dans votre boîte de réception. Chaque fois que vous y pensez, une résistance sourde s’installe. « Je le ferai demain. » Mais demain devient après-demain, puis la semaine suivante, puis le mois d’après.
Pourquoi ? Parce que l’évitement n’est pas une question de temps ou de paresse. C’est une réaction de protection. Ce dossier, cette démarche, n’est pas qu’une tâche à cocher : il incarne une peur , celle de l’échec, du jugement, ou de perdre le contrôle, une croyance « Je ne suis pas à la hauteur », ou un conflit interne « Si je m’en occupe, je devrai affronter une réalité inconfortable ». Alors, comment en sortir ?
Découper l’insurmontable en micro-étapes
Prenons l’exemple de Marc, un entrepreneur qui repousse sa déclaration de TVA depuis des mois. Pour lui, « faire sa déclaration » est une montagne insurmontable. Mais un jour, il décide de ne faire qu’une seule chose : ouvrir le dossier et trier ses factures par mois. Rien de plus. Une fois cette étape franchie, il réalise que la tâche n’est plus aussi intimidante. La semaine suivante, il remplit la première ligne du formulaire. Puis une autre.
Pourquoi cette méthode fonctionne ? Le cerveau perçoit une tâche complexe comme une menace. En la réduisant à une action de moins de cinq minutes, on contourne cette résistance. « Je n’ai pas à tout faire aujourd’hui. Je n’ai qu’à commencer. » C’est souvent tout ce qu’il faut pour briser l’inertie.
Clarifier les vrais enjeux et vous dégonflerez vos peurs
Sophie, une freelance, évite systématiquement de négocier ses tarifs avec ses clients. « Ils vont me trouver trop chère et partir », se dit-elle. Pourtant, quand elle prend une feuille et écrit :
- Qu’est-ce que je risque vraiment ? « Un client pourrait refuser. Mais la plupart accepteront, ou je trouverai d’autres clients. »
- Qu’est-ce que je risque à ne pas le faire ? « Continuer à me sous-payer, et ruminer ma frustration. »
Soudain, l’équation change. La peur perd de son pouvoir quand on la confronte à la réalité.
Astuce pratique : Écrivez vos craintes. Les voir concrètement, vous permet souvent de réaliser qu’elles sont moins fondées vous ne le pensiez.
Trouver un allié pour briser l’isolement
Pierre, un artisan, repousse depuis des mois la mise à jour de son assurance professionnelle. « Je ne comprends rien à ces contrats », avoue-t-il. Le déclic ? Un appel à son expert-comptable, qui lui explique en dix minutes les points clés. « Je me sentais bête de ne pas savoir, mais en fait, c’est normal de ne pas tout maîtriser », réalise-t-il.
Pourquoi cela change tout ?
- Un tiers neutralise la charge émotionnelle : ce n’est plus « moi contre le dossier », mais « nous contre le problème ».
- Cela permet de dédramatiser : ce qui semblait complexe devient gérable avec un guide.
Acceptez l’imperfection et agissez quand même
Claire, une cheffe d’entreprise, a passé des années à reporter la refonte de ses statuts juridiques. « Je veux que ce soit parfait, alors je remets à plus tard », confiait-elle. Jusqu’au jour où son avocat lui a dit : « Claire, une version imparfaite aujourd’hui vaut mieux qu’une version parfaite dans deux ans. »
Elle a soumis un dossier incomplet, mais suffisant pour lancer la procédure.
Résultat ? Les ajustements ont été faits en cours de route, sans conséquence grave.
Retenez ceci et soulagez-vous :
- Aucune démarche administrative n’exige la perfection. Les erreurs se corrigent (et je précise des deux cotés).
- Agir, même mal, est toujours mieux que ne pas agir du tout. L’inaction, elle, a un .

Commentaires
Enregistrer un commentaire
Merci pour votre votre lecture et votre commentaire !